Swami
Dayananda Saraswati est un Swami [1]
très réputé de la tradition de l’Advaita Vedanta. Capable de
s’exprimer couramment dans plusieurs langues, anglais compris, il a
pu toucher des centaines de milliers de personnes à travers ses
écrits, ses discours et son enseignement. Il a fondé l’Arsha
Vidhya Gurukulam, ainsi que plusieurs institutions charitables de
par le monde.
Hindu
Voice UK l’a rencontré lors de son récent voyage au
Royaume-Uni en août 2006.
«
Je considère toute personne comme hindoue tant qu’elle n’affirme
pas ne pas l’être »
SwamI Dayananda Sarasvati.
Qu’est-ce
qui vous a conduit à devenir Swami ?
J’ai
toujours été attiré par la spiritualité, mais mon intérêt s’est
vivement accru après avoir entendu une conférence de Swami
Chinmayananda à Madras. J’avais dans les 25 ans, à l’époque,
et j’étais journaliste. Je me suis consacré de plus en plus à
l’étude des écritures, et j’ai approfondi mes connaissances
auprès de différents maîtres spirituels, ce qui m’a conduit à
devenir moi-même un Swami.
Comment
votre famille a-t-elle réagi ?
Le
milieu dont j’étais issu était assez traditionnel et religieux,
avec une éducation védique et sanskritique de base, mais pourtant,
l’idée que je devienne Swami était plutôt mal acceptée. Ils
étaient contents que j’étudie ces enseignements, mais
désapprouvaient ma décision. Ils savaient que la vie d’un Swami
n’est pas une vie facile et ne voulaient pas que je me décide trop
vite. Le fait que ce choix entraînerait la perte d’un revenu pour
la famille les inquiétait aussi.
Quel
est, selon vous, l’enseignement le plus important de l’hindouisme
?
S’il
ne fallait choisir qu’un aspect, ce serait l’idée que le Divin
est l’unique réalité, qui peut être invoquée à travers
n’importe quel nom, sous n’importe quelle forme. Tout culte rendu
avec un cœur pur est valable. Il peut prendre un million de formes,
s’appliquer à tout nom ou support de votre choix. Ceci est le
point de vue universel de l’hindouisme. L’hindouisme est une
religion très profonde, qui n’est pas fondée sur de simples
croyances. Il ne suffit pas de croire, Dieu doit être compris.
Que
vous inspire l’Inde moderne, la direction qu’elle est en train de
suivre ?
Sur
un plan économique, l’Inde est dans une bonne voie. Mais
politiquement les orientations actuelles sont préoccupantes car
elles ont des effets nuisibles pour la culture et la tradition. Des
forces bien établies sont à l’œuvre, qui visent à saper l’unité
du pays tant sur un plan politique que culturel, et elles ont
progressé de façon considérable dans leurs objectifs.
L’Inde
deviendrait-elle trop matérialiste ?
Pas
vraiment. En apparence, on peut avoir l’impression que les Hindous,
dans l’Inde d’aujourd’hui, sont devenus très matérialistes et
pleins d’avidité. Mais si l’on regarde sous la surface, on se
rend compte que ce n’est pas le cas. Les valeurs spirituelles, le
sens du devoir, sont toujours très vivants dans toutes les couches
et catégories d’âge de notre société. Mais tout le monde, dans
ce monde de compétition, recherche la sécurité matérielle. Il y a
quelques générations, on vivait dans une société où tout le
monde savait ce qu’il ferait avant même d’être né. La vie
suivait un chemin entièrement pré-établi. Il n’y avait aucune
raison de s’inquiéter parce que c’était un environnement sans
compétition. Mais ce monde est en train de disparaître. Subitement,
les Indiens d’aujourd’hui se retrouvent plongés dans une
concurrence intensive. Tout le monde est en compétition pour les
emplois, les ressources. C’est comme si on mettait un chat
domestique dans un milieu sauvage.
Et
selon vous, est-ce une bonne ou une mauvaise chose ?
Je
ne peux pas dire si ce changement est bon ou mauvais, mais c’est la
réalité, et on ne peut pas revenir en arrière.
Vous
avez beaucoup voyagé hors de l’Inde. Quel est votre point de vue
sur la société occidentale ?
Je
n’ai aucun problème particulier avec l’Occident. Les occidentaux
ont accompli beaucoup de choses. Mais ils ont atteint un stade de
matérialisme extrême qui les met en face de certaines réalités
difficiles : toutes ces maladies mentales, ces problèmes de
dépression, etc., si répandus en Occident, même chez les gens
riches financièrement parlant. La sagesse de l’Inde ancienne offre
des solutions à de tels problèmes. La société a besoin de
comprendre que le plus important, pour une personne, est d’être en
harmonie avec soi-même, et que nous devons découvrir qui nous
sommes vraiment.
Vous
avez fondé, récemment, le « Hindu Dharma Acharya Sabha ». Quels
sont ses buts ?
C’est
une organisation qui permet à tous les chefs spirituels des
anciennes écoles hindoues de se rassembler dans une fédération.
Beaucoup de problèmes qui concernent l’hindouisme nécessitent une
prise de position collective de la part des dirigeants religieux. Les
événements récents au temple de Tirupati Balaji, où le
gouvernement de l’état d’Andhra Pradesh, dirigé par un chrétien
« born again » a essayé de confisquer des terres appartenant
depuis longtemps au temple pour les vendre aux enchères à des
groupes chrétiens, nous ont vraiment réveillés. Nous avons réussi
à nous unir face à cela, et le gouvernement de l’AP a
reculé.
Certains Hindous
disent que le fait de se mêler des problèmes de la société et des
conflits qui la traversent , ou même d’avoir des opinions marquées
sur ces sujets, comme, en particulier, le problème des conversions
religieuses, est « anti-spirituel » et que c’est un comportement
inapproprié pour un Swami. Quelle est votre position sur cette
question ?
Un sadhu ne peut pas participer
directement aux affaires politiques. Cependant, je suis en droit de
prodiguer des conseils, comme le faisaient Vashista [2]
et Vyasa [3],
si quelqu’un les recherche.
Actuellement, la
société hindoue en est à un stade où n’importe qui peut être
appelé à s’acquitter de devoirs qui ne lui sont pas assignés
selon la tradition. Par exemple, les rôles traditionnels attribués
aux Kshatryas [4]
au sein de la société ne sont pas assumés par ceux qui ont cette
ascendance, et donc tous ceux qui ont une disposition naturelle à
jouer ce rôle devraient le faire.
Selon
vous, une personne qui n’est pas hindoue de naissance peut-elle le
devenir ?
Je
considère toute personne comme hindoue tant qu’elle n’affirme
pas ne pas l’être.
Notes
:
[2]
Vashista : rishi védique, frère d'Agastya, auquel on attribue un
grand nombre d'hymnes des Veda. Vasistha et Agastya sont tous deux
des descendants de Mitra ainsi que de Varouna, le Dieu de la
mer.
[3]
Vyasa : rishi védique, semi-divin, auteur de la grande épopée du
Mahâbhârata. C'est également lui qui aurait mis en forme
les hymnes du Veda tels qu'ils nous sont parvenus
No comments:
Post a Comment